Arthur Gillet (né en 1986) est un peintre et fabrique des objets. Son travail explore la nature ambivalente du langage et de l’identité, leurs fragilités, les contraintes des normes et les stratégies de suradaptation qui en découlent. Ces thématiques le traversent depuis l’enfance, aux côtés de ses parents sourds.
L’art devient pour lui un espace de communication et d’autodéter- mination, nourri par la contrefaçon, le travestissement, le passing (de genre comme de classe) et une relecture critique de l’histoire de l’art. Sa réflexion, enrichie par la psychanalyse et les études CODA (Children of Deaf Adults), s’enracine dans une éthique issue de ses engagements féministes, queer, pour la Palestine et sociaux.
Il hérite des stratégies d’action et de résistance de sa mère, militante du Réveil sourd des années 1990, mouvement œuvrant à la réhabilita- tion de la Langue des Signes Française. Cette politique de bannisse- ment, instaurée en 1880 jusqu’en 2005, entraîna un taux d’illettrisme de près de 80 % parmi les personnes sourdes recensées en 1998.
Témoin de la précarité économique de ses parents, vivant à Villejean — cité HLM de Rennes — il obtient un baccalauréat au rattrapage, puis, en 2011, un Diplôme national supérieur d’expression plastique avec les félicitations du jury à l’École des Beaux-Arts de Rennes. Parallèlement, il se forme à la danse contemporaine et participe activement à la scène nocturne européenne.
Sa pratique picturale privilégie le bois et s’oriente vers le cuivre — pour ses propriétés conductrices et sa similitude avec la dorure. Elle s’ac- compagne d’un travail sur la peinture sur soie, qu’il a apprise enfant à Rennes. Par sa transparence, ce support se situe entre vitrail et écran, interrogeant la manière dont les technologies de communication compensent les exclusions sociales tout en façonnant nos croyances et notre rapport au réel.

Photography by Elisabeth Lebovici